Le patrimoine des îles Éparses ne se juge pas sur sa monumentalité, mais sur sa capacité à exprimer des modes de vie, une adaptation au milieu, une inscription stratégique.Docteur habilité à diriger des recherches en histoire des relations internationales, Paul Villatoux est maître de conférences à l’Université catholique de l’Ouest à Saint-Denis, responsable pédagogique de la licence de Science Politique. Son ouvrage sur Les îles Éparses, entre poussières d’Empire et points d’appui stratégiques dans l’océan Indien est en cours de publication.Les îles Éparses ne livrent qu’à demi-mot les traces de leur histoire. Faiblement peuplées, souvent absentes des représentations collectives, elles conservent pourtant les marques concrètes des présences humaines successives : concessions privées d’exploitation, missions scientifiques, détachements militaires. Chaque époque a laissé derrière elle une architecture adaptée à ses moyens et à ses finalités – depuis la grande bâtisse de Juan de Nova jusqu’aux stations météorologiques de Tromelin et Europa, en passant par les cases rudimentaires des Glorieuses. Cette architecture, sobre, fonctionnelle, parfois éphémère, témoigne d’un mode de vie insulaire fondé sur l’autonomie, la résilience, et l’adaptation aux conditions extrêmes. Elle s’inscrit en outre dans un continuum régional avec d’autres îles de l’océan Indien, en particulier dans les Seychelles, où les contraintes d’isolement et les logiques de production ou de surveillance ont également modelé des formes spécifiques d’habitat et d’organisation de l’espace.