Rant dann Ron, maloya la pa nou la fé…Art et MémoireCette exposition de photographies de Jean-Marc Grenier est organisée par deux institutions culturelles du Département de la Réunion.Le musée historique de Villèle, à Saint-Gilles-les-Hauts, d’abord, où elle a débuté dans le cadre d’une résidence d’artiste « Patrimoine et Création » menée par l’artiste en 2022 et à l’issue de laquelle quelques clichés ont été présentés sur le site.Appelé à devenir un lieu privilégié de connaissance du monde de l’habitat et de l’esclavage, qui consacrera, dans son nouveau parcours, des espaces particuliers aux héritages de cette période historique, le musée de Villèle est d’ores et déjà impliqué dans toutes sortes d’actions de préfiguration historique et mémorielle (programmes de recherche et d’édition, portail sur l’histoire de l’habitat et de l’esclavage, atlas de l’esclavage à Bourbon…), artistique et culturelle (commandes d’œuvres, organisation d’un Gran 20 Désanm, etc.).En ce qu’elles reflètent un univers culturel directement lié aux apports africains et malgaches dans la culture et la société réunionnaise, les photographies de Jean-Marc Grenier s’inscrivent dans ce temps de préfiguration. L’artiste revendiquait vouloir porter un regard personnel sur les vibrations, et parvient finalement à rendre compte des émotions et de cette « sensation indicible d’un lien qui, à travers le maloya, traverse l’Île de part en part, relayée par la percussion sourde et obstinée des roulades d’avant en arrière, chambres d’écho de souffrances lointaines et d’épiphanies singulières » (J.-M. Grenier).L’atmosphère particulière qui se dégage des photos, parfois prises au cœur même de l’intimité des familles, retient longtemps l’attention : les prises de vue photographiques deviennent des documents, des documents indispensables au musée d’histoire.L’Artothèque, ensuite, dans le cœur historique de Saint-Denis, où ce travail de recherche se déploie désormais de manière plus complète autour de Ron Maloya et de Servis Kabaré, et inévitablement autour du maloya puisqu’il est omniprésent dans les deux pratiques observées.L’ensemble photographique révèle une démarche anthropologique et esthétique, il trouve dans le cadre de ce site urbain un écrin propice à la découverte curieuse.Le Ron Maloya et le Servis Kabaré ont droit, en effet, de cité dans ce lieu dédié à l’art contemporain, qui abritait aussi autrefois des expositions à la croisée de l’art et des sciences humaines, « Abolished, not removed ? », « Bwadébène », « De la réalité populaire »…Entre art et mémoire, Rant dann Ron, maloya la pa nou la fé… est empreint du même mystère et de la même dignité.